Les banques européennes rattrapées par les scandales financiers
Paris (awp/afp) – Après les spectaculaires amendes infligées aux banques américaines, les grandes banques européennes sont à leur tour rattrapées par des scandales financiers qui pourraient leur coûter plusieurs centaines de millions d’euros en pénalités.
Les établissements se retrouvent dans le viseur des autorités pour des affaires de manipulation présumée des taux interbancaires Libor et Euribor, et plus récemment pour de possibles manipulations du marché des changes.
Après les régulateurs britannique, suisse, néerlandais et américain, c’est l’autorité de la concurrence européenne qui s’apprête à sanctionner six banques dans le cadre de la manipulation de l’Euribor, un taux interbancaire, selon des informations de presse.
Les amendes pourraient approcher le milliard d’euros par établissement et concerneraient Royal Bank of Scotland, Société Générale, Deutsche Bank, JPMorgan, HSBC et Crédit Agricole.
“Notre enquête sur ces ententes est très avancée, et il y aura bientôt des informations”, indiquait fin octobre le commissaire européen à la Concurrence, Joaquin Almunia, estimant que l’affaire était “d’importance majeure”.
Les enquêtes cherchent à savoir si les traders au sein de certaines banques ont manipulé les taux utilisés pour déterminer le Libor et l’Euribor, dont dépendent des centaines de milliards d’euros de produits financiers. Leur niveau a par exemple une incidence sur les taux des prêts aux particuliers ou aux entreprises.
En France, Crédit Agricole a fait savoir jeudi qu’il refusait l’idée d’un accord à l’amiable avec le régulateur européen, estimant avoir un “très bon dossier”.
En passant par une négociation à l’amiable avec les autorités, les banques peuvent espérer une ristourne sur la sanction.
Sa compatriote SocGen a passé dans ses comptes une provision pour litiges de 200 millions d’euros ce trimestre, portant sa provision collective totale à 700 millions fin septembre, sans toutefois faire de lien avec un dossier en particulier.
Outre-Rhin, la première banque allemande Deutsche Bank a fait savoir qu’elle coopérait avec plusieurs autorités de régulation dans le cadre d’une enquête préliminaire sur des manipulations du marché des devises.
Impliquée dans plusieurs litiges, l’établissement a annoncé une provision de 1,2 milliard d’euros pour faire face à ces risques, portant à plus de 4 milliards d’euros le total des provisions pour litiges. Selon les analystes de Société Générale, “ces provisions pèsent sur la rentabilité”.
PLUSIEURS ENQUÊTES SUR UBS
Le géant suisse UBS va devoir de son côté renforcer significativement ses fonds propres suite à une demande du régulateur banquier suisse liée notamment “aux contentieux juridiques en cours”.
Comme Deutsche Bank, UBS fait l’objet de plusieurs enquêtes, allant d’affaires d’évasion fiscale à des soupçons de manipulation du taux Libor. Dans le cadre du Libor, UBS a déjà dû payer plus de 1 milliard de francs suisses d’amende.
Selon les calculs des analystes de Santander, les affaires judiciaires coûteront 3,4 milliards de francs suisses à UBS jusqu’en 2015, soit 22% de ses bénéfices avant impôts entre le quatrième trimestre 2013 et fin 2015.
Aux Etats-Unis, les nombreuses affaires dans lesquelles sont impliquées les banques (Libor, Subprimes, Baleine de Londres..) leur ont coûté pas moins de 103 milliards de dollars depuis 2008, selon les estimations de l’agence Bloomberg.
Au-delà des coûts, ces scandales ternissent l’image des banques, à l’instar de la néerlandaise Rabobank, qui va devoir payer 774 millions d’euros d’amende dans le cadre de l’affaire du Libor.
“La banque, qui a toujours communiqué en tablant explicitement sur une image raisonnable et sobre, n’a pas réussi à rester à l’écart de la culture macho des banques d’affaires motivées par les bonus”, a jugé au lendemain de cette annonce le quotidien de référence néerlandais de Volkskrant.
“+La petite gentille+ a été démasquée de manière spectaculaire en tant que criminel en col blanc”, estime le journal.
Dans la foulée de cette annonce, le directeur général Piet Moerland a annoncé sa démission. Comme l’avait fait un auparavant le directeur général de la britannique Barclays, dont l’implication dans l’affaire du Libor lui avait coûté 290 millions de livres.
Barclays se retrouve d’ailleurs de nouveau dans le collimateur de la justice dans le cadre des possibles manipulations sur le marché des changes.
Barclays a précisé qu’il ne lui était “pas possible à ce stade de prévoir l’impact que ces investigations auront” sur le plan financier. Royal Bank of Scotland (RBS) et HSBC ont également confirmé ces derniers jours faire partie des banques visées par les autorités dans cette affaire.
“Je suis convaincu que la stricte application des règles de concurrence (…) est essentielle pour restaurer la confiance dans la fiabilité des taux de référence et dans l’industrie financière en général”, a estimé M. Almunia.
afp/rp