Les économistes et les experts réunis hier par la Coface sont sceptiques sur les mesures mises en oeuvre à l’échelle européenne pour résoudre la crise de la dette souveraine.
L’Europe est mal partie, à en croire les économistes et les experts réunis hier lors du colloque annuel de la Coface, à Paris.
Première accusée : l’Allemagne. Après la dégradation, vendredi, par l’agence de notation Standard & Poor’s, des notes de neuf des dix-sept pays de la zone euro, l’ancien député européen Jean-Louis Bourlanges s’interroge : « Pourquoi ne pas sanctionner l’Allemagne, qui nous enferme dans la stricte rigueur budgétaire alors que ce n’est pas le seul problème ? » On est « dans un huis clos avec l’Allemagne », renchérit François Heisbourg, conseiller spécial de la Fondation pour la recherche stratégique. « Pour un point de réduction de déficit public, la France perd 0,5 point de PIB », rappelle l’économiste en chef de Natixis, Patrick Artus.
Les propos n’ont pas fait bouger d’un iota le ministre français des Finances, François Baroin. L’Allemagne est au contraire « le modèle et l’élément de référence vers lequel nous devons converger », a-t-il déclaré hier en marge de ce colloque. Il faut, dit-il, « aborder avec confiance les semaines à venir ».
Le traité intergouvernemental européen qui doit être ratifié à la fin du mois est pourtant loin de faire l’unanimité parmi les experts. « Ce n’est pas en autorisant les Etats à réaliser 0,5 % de déficit qu’on va sauver l’euro !, critique François Heisbourg. Pour un pays comme la France, cela supposera de dégager un excédent budgétaire de 60 milliards d’euros par an à partir de 2013. Les Etats ne supporteront pas un tel remède de cheval. » « On n’est pas au stade de la pensée, on est tombés dans le piège des règles automatiques », embraye Patrick Artus. « L’Union européenne gère très mal le problème, regrette encore Jean-Louis Bourlanges. On a réussi à transformer une petite coupure grecque en une septicémie. »
Que faire, alors ? « Sortir la Grèce de la zone euro – pendant quelques années -ainsi que l’Espagne, le Portugal et l’Irlande », rétorque l’économiste allemand Max Otte, qui, en 2006, annonçait le tsunami financier des « subprimes ». « Il faut isoler le cas de la Grèce et soutenir l’Italie et l’Espagne, propose Patrick Artus. qui suggère à la Commission européenne d’embaucher des économistes. La Grèce a un problème de solvabilité, l’Italie et l’Espagne, un problème de liquidité. On prête à ceux à qui on ne devrait pas prêter. » Face à toutes ces critiques, l’homme d’affaires grec Nicolas Vernicos, président de la Chambre de commerce internationale en Grèce, conclut, peu encourageant : « Deux ans après l’arrivée de la troïka [les bailleurs de fonds de l’Union européenne et du FMI], la Grèce a une situation bien pire qu’avant puisque notre dette publique est passée de 115 à 160 % du PIB. »